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Bienvenue à Zyrconia
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10 janvier 2017

Chapitre Sixième ~ L'Ire de l'Océan (Quatrième Partie)

chapitre6-3(Quatrième Partie)

« Toutes les eaux sont couleur de noyade... »

AguaMarina reposait au sud d'une petite île ronde cernée de toutes parts - sauf devant le village où s'étalaient des plages de coquillages - par de hautes falaises de roche marine d'où s'écoulaient de nombreuses sources d'eau douce. Les géologues qui avaient eu jadis la permission de pénétrer sur l'île n'avaient jamais réussi à percer le mystère de cette eau miraculeuse ; personne ne savait quelle était son origine, sa source première ; elle jaillissait simplement des rochers et s'accumulait dans de petits lagons qui irriguaient une jungle sauvage.

Des espèces animales et végétales qu'on ne pouvait voir nulle part ailleurs se partageaient cet espace préservé : des fougères enchevêtrées aux vives couleurs et aux larges feuilles dentelées suffisamment grandes pour ombrager de leur verdure le dangereux tarmit, aya aux allures de drakone mais sans ailes, qui vivait dans cet écosystème depuis des millénaires ; l'aigle poldervaar au plumage éclatant, qui nichait dans les palmiers géants ; et le dickin, sorte de géant bipède autrefois utilisé comme bête de bât par les natifs de l'île, et qui arpentait la jungle de ses longues enjambées. Des espèces si rares que même le grand musée zoologique de SolaPiair n'en possédait qu'un ou deux exemplaires.

Cet environnement, unique en son genre, allait subir un assaut destructeur. Le général Wavell, resté sur le pont du navire et qui observait l'île devant lui, songea à toute cette vie foisonnante condamnée à mort, sauvage et innocente, dont la perte serait irremplaçable. L'injustice de la chose lui serra le coeur, mais il devait obéir à ses ordres. Il ferma les yeux à toute cette beauté menacée.

A peine touché le rivage d'AguaMarina, des troupes en armures sortirent par dizaine des flancs du bateau. à leur tête, le général Wavell, le casque rabaissé sur son visage à l'expression grave, ruminait de sombres pensées. Personne pour les accueillir, où étaient donc passés les habitants ? Il se prit à espérer un instant que, paniqués à l'annonce de leur arrivée, les Insulaires avaient pris la fuite, laissant là l'Emïamneve à la merci des soldats de l'Empire ; mais il en doutait : les Insulaires étaient réputés pour leur courage et leur ténacité. Ils se tenaient sans aucun doute terrés quelque part, attendant le bon moment pour se manifester.

Il n'en décida pas moins de se diriger vers le centre du village, où trônait le Temple des Mers Nordiques, le réceptacle de la précieuse Gemme dont il avait l'ordre de s'emparer, par la force s'il le fallait. Le cas échéant, la petite armée dont il disposait suffirait peut-être à faire entendre raison aux habitants. Il ne redoutait rien plus que de devoir se battre…

Les huttes de coquillages recouvertes d'algues semblaient désertes ; des caisses de bois flotté, dont certaines contenaient encore du poisson, jonchaient le sol. Le vent du large faisait voler les morceaux de voile que les Insulaires avaient repêché pour décorer leurs maisons, comme de macabres trophées. Et pourtant, le général Wavell sentait dans l'air une tension certaine, comme si la mer retenait son souffle. Quelque chose de terrible allait se passer, il en avait l'intuition, et, pendant un instant, il porta la main à son front, redoutant encore une fois l'assaut des cris dans sa tête…

Se ressaisissant, il continua son chemin, d'un pas qui se voulait décidé. Il ne fallait pas que ses hommes croient qu'il était la proie de la moindre faiblesse.

En arrivant en vue du Temple, ses craintes se vérifièrent : la plupart des habitants étaient massés sur le parvis surélevé, armés de harpons, de piques et de coutelas qui brillaient par intermittence quand le soleil se montrait entre les nuages. Le reste de la population se trouvait sur le toit du bâtiment, plus ou moins caché derrière les maigres « fortifications » de l'architecture. Le général Wavell fit signe à ses soldats de s'arrêter tandis que lui-même montait les trois premières marches qui menaient au parvis. Il s'éclaircit la gorge : il n'avait pas le Don d'Aegys, et il allait devoir improviser. Beaucoup de choses - et de vies - dépendaient des mots qu'il utiliserait.

Je vous salue, peuple de la mer, commença-t-il, mettant dans sa voix tout le respect possible. Je ne suis pas venu vous chercher querelle mais pour vous demander votre aide contre un danger qui menace Zyrconia…
— Nous ne vous saluons pas, lui répondit un homme au visage émacié et à l'expression courroucée, qui portait autour du cou un large collier de dents de requin. Vous ne venez pas apporter la guerre, dites-vous, je suppose donc que vos soldats ne sont qu'une garde rapprochée ?! Nous savons pourquoi vous êtes ici, et sachez que vous n'arriverez à rien. Repartez immédiatement ou nous vous combattrons !

Wavell se campa fermement devant le chef de village. Il savait que s'il ne mettait pas toute l'autorité possible dans ses mots, ils couraient au massacre.

L'Empereur Diaman a besoin de votre gemme afin de faire face à une grande épreuve, déclama Wavell. Je connais le prix que vous lui attachez et elle vous sera rendue quand Zyrconia ne courra plus aucun danger.
— Il suffit. L'homme avait fait un pas en avant, tout en resserrant sa main autour du harpon qu'il tenait. Est-ce le même discours que vous avez servi aux autres villages élémentaires ? Oui, nous savons tout. Les quatre cités élémentaires sont connectées entre elles par des liens invisibles, et notre prêtresse-mère a entendu la voix de Dame Amethys : TigrEye et LazuLapi ont été rayés du monde. Et c'est ce qui se passera ici si nous vous laissons violer notre Temple. Si les Gemmes sont déplacées, tout est fini. Vos vaines promesses n'abusent personne. Je vous le répète : retournez sur votre bateau.

Wavell s'agita nerveusement. L'homme avait raison, bien sûr. Il savait que le vol de l'Emïamneve provoquerait la destruction d'AguaMarina, mais il n'avait malheureusement pas le choix. Il devait s'emparer de cette pierre.

Je comprends votre position, mais si vous me donnez maintenant la Gemme, vous aurez tout le temps de quitter l'île en sécurité ; je veillerai à ce que le port d'Akroïth vous accueille et vous aide. Mais si vous refusez, je donnerai l'ordre à mes hommes d'attaquer et le nombre de morts pourrait être conséquent… Le choix vous revient.
— Et la réponse est la même ! Nous ne sommes pas du genre à fuir devant le danger ! Nous préférons tous mourir ici, devant le Temple, en protégeant ce qui est vraiment important, plutôt que de sauver nos vies !
— Réfléchissez, et pensez à l'avenir de vos enfants, rétorqua Wavell, avec dans la voix toute la fermeté dont il était capable. Quoi qu'il arrive, que vous vous battiez ou que vous fuyez, votre Gemme reviendra à l'Empire. Cette île est condamnée, à quoi bon multiplier les morts ?
— Vous oubliez une option, lui répondit le chef de village avec un sombre sourire : le fait que nous puissions vous battre et vous renvoyez d'où vous venez !
— Je ne compterais pas sur cette éventualité à votre place. Je possède dans mon navire des armes d'un nouveau genre dont vous n'avez pas idée : des armes capables de déchiqueter les corps en mille morceaux. Imaginez vos cadavres en lambeaux, non ensevelis, reposant à l'air libre sur cette île en perdition ?

Wavell répugnait à utiliser de tels arguments, mais devant la mine effarée de son interlocuteur, il comprit qu'il avait touché juste. La simple perspective de voir son cadavre lacéré se décomposer sans reposer dans le sein de la terre devait être suffisante pour faire réfléchir n'importe quelle personne douée d'un peu de raison. Parmi les Insulaires, des gémissements à peine contenus se firent entendre, que le chef de village, d'un regard, tenta de faire taire. Un ou deux adultes fondirent même en larmes. Pendant un instant, le général eut l'espoir que ce peuple courageux allait céder. C'est à ce moment que Wavell sentit un mouvement derrière lui ; il craignit que son armée ne se soit déjà mise en marche, sans son ordre. Mais deux individus surgirent brusquement, montèrent les marches à côté de lui à toute vitesse et vinrent se poster aux côtés du chef de village.

Il faut résister ! Ne vous laissez pas faire par cet homme !

Wavell détailla le jeune homme qui avait parlé : il avait de longs cheveux blancs, le teint pâle, et ses yeux rouges flamboyaient à la perspective du combat. L'autre portait de courts cheveux noirs et une tunique de même couleur. Il ne les connaissait pas et d'après leur apparence, ils n'étaient pas d'AguaMarina.

L'homme au harpon les regarda, médusé de cette intrusion, et les menaça également de son arme.

Calmez-vous ! continua le jeune homme au teint pâle, en agitant les mains. Nous sommes de votre côté ! Nous sommes des survivants de TigrEye et de LazuLapi ! Nous sommes venus vous aider à faire face à votre ennemi ! Nous ne voulons pas que votre village subisse le même sort que les nôtres ! Nous pouvons gagner !

Il dégaina alors l'épée qu'il avait au côté, et celle-ci s'enflamma presque aussitôt.

Moi aussi je préférerais mourir plutôt que de laisser voler votre Gemme ! intervint à son tour l'autre homme aux cheveux sombres, d'un ton résolu. J'ai laissé voler celle que je protégeais et cela ne se reproduira plus si je peux l'empêcher !

Des cris retentirent, appuyant ce discours, tandis que d'autres geignements de dépit essayaient de s'imposer. Le chef du village harangua alors la foule derrière lui :

Ces étrangers ont raison ! déclama le chef, dont les yeux s'étaient rallumés suite au discours des deux arrivants. Ne craignons pas pour nos corps ! Les dieux nous récompenserons d'une belle mort pour avoir protégé notre bien et notre maison ! Ne laissez pas votre coeur faiblir !

Et il se remit en position de combat tandis que ses administrés se massaient vers l'avant de l'esplanade avec leurs armes, leur courage retrouvé grâce à celui de leur chef. De nouveau, ils étaient tous unis face à l'adversité.

Wavell fit une grimace de dépit sous son heaume. Ce qu'il avait craint allait se produire. Comment aurait-il pu convaincre un peuple qui préférait sacrifier sa vie plutôt que son honneur ? Aucun argument ne pouvait être assez fort, assez terrifiant, pour les détourner de leur résolution. Le général impérial admira ce courage... Cependant, il ne pouvait détacher ses yeux du jeune homme blanc ; il se mit à trembler et sentit remonter en lui des bribes d'images, de superstitions, de souvenirs lointains, de figures taillées dans la pierre, de représentations d'êtres sages et anciens… d'entités aux cheveux blancs et aux yeux rouges… Il se secoua vivement, chassant avec peine ces réminiscences.

Vous refusez le choix que je vous offre, prononça-t-il d'une voix peinée. Je vais donc devoir choisir à votre place...

A contrecoeur, il leva le bras afin que tous ses soldats puissent le voir et l'abaissa. Aussitôt, l'armée impériale se mit en branle derrière lui, l'entourant de toutes parts, et chercha à forcer l'entrée du parvis, tenue par les trois hommes.

http://gemminy0.wixsite.com/gemminy/lexique

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